Interview paru dans UR17

Jamasound

U.R. : On commence par une présentation du groupe ?
David : On est cinq : Fred au sax, Pam à la batterie, DJI'M à la Contrebasse, Fred qui vient d'arriver au trombone et moi à la guitare

U.R. : Ca fait longtemps que vous êtes " Jamasound " ?
David : 2 ans

U.R. : C'est votre premier groupe ?
David : On a tous participé à plein d'autres groupes, on mélange nos parcours

U.R. : Vous avez quelles influences ?
Fred : Pour les influences communes le Rock Steady, le Ska, Reggae, Ragga, Rap, Salsa… Dans Jamasound il y a plein de choses.

U.R. : Vous êtes tous de Marseille ?
David : Importés…
Fred : Moi j'étais à Paris. Ca fait trois ans que je suis à Marseille et je suis le dernier arrivé.
David : Moi Lille, Paris, Marseille, ça fait 7 ans que je suis à Marseille. Toi t'es l'ancêtre (… au batteur).
Pam : 8 ans à Marseille je crois, et avant à Paris aussi.

U.R. : Le 28/01 vous jouez avec Jim Murple, vous vous connaissez bien ? (Précision après interview : le concert a été annulé)
David : C'est des gens que je voyais régulièrement sur Paris, et j'ai eu l'occasion de jouer avec eux. C'est des cousins dans la musique.
Pam : On a joué dans les mêmes groupes mais pas en même temps. Par exemple Romain et moi on a fait parti de la même formation mais pas en même temps.

U.R. : Il y a d'autres groupes dont vous êtes proches ou avec lesquels vous tournez ? Des noms !
Pam : On pourrait citer des noms de formations parce qu'on connaît pas mal de monde. On a déjà participé à des "plateaux" avec La Kemia d'Aubagne, Boy System du Mans… et y a les groupes de Marseille bien sûr, Gang Jah Mind ou Raspigaous. C'est important entre nous d'être solidaires parce que c'est pas évident de s'en sortir. Il n'y a pas de lieux autogérés ici à Marseille, contrairement au Pays Basque par exemple.
David : Dès le Sud Ouest ça commence à être vraiment intéressant pour ça, mais Marseille c'est le désert du point de vue de l'autogestion.

U.R. : Vous en êtes à combien de concerts depuis que vous êtes ensemble ?
David : Une quarantaine au moins.

U.R. : Vous vous sentez impliqués par rapport à la scène Marseillaise ?
David : Evidemment, parce que c'est ici que l'on vit.

U.R. : Il y a beaucoup de groupes sur Marseille ou Toulouse (par exemple) qui revendiquent à fond cette appartenance au Sud. Est-ce que pour vous c'est le cas ?
David : Là il faudrait faire un tour de table. Moi je suis venu ici parcequ'on m'a appelé pour jouer dans un groupe qui s'appelait Hypnotik Sound, ça aurait pu être ailleurs… J'étais à Lille, j'ai habité Paris, maintenant Marseille, peut être qu'un jour j'habiterais ailleurs. Y a du bon et du mauvais partout, mais j'aime bien Marseille
Pam : La scène Marseillaise c'est clair qu'on en fait partie, parcequ'on a fait bouger des trucs à notre manière, en étant musiciens, en rencontrant des gens. Il y a ici des gens de qualité et d'autre de moindre de qualité, comme à peu près partout, et on en est parce que c'est là qu'on joue et qu'on aime y jouer. C'est clair qu'il y a un rapport assez fort avec Marseille puisqu'on n'arrête pas d'être obligé de prendre position sur cette question de rivalité Marseille/Paris qui revient toujours. Et, comme dit David, on ne peut pas prendre les mêmes positions que certains parce que la vie nous a fait nous déplacer, que l'on est plutôt des nomades. Notre questionnement par rapport à l'origine, il dépasse le côté "autochtone", et il y a même des désaccords, parfois, avec des gens de cette scène.

U.R. : Le côté "Fier d'être Marsellais" ?
Pam : Oui c'est ça, il y a carrément des points de désaccord là dessus , mais ce sont des discussions qui sont sur la table. Il y a des échanges et c'est vrai que Marseille est une ville qui bouge, où on peut s'enfermer, mais ça bouge.

U.R. : Est-ce que vous, vous la ressentez cette rivalité entre Paris, qui a un côté un peu hégémonique, et les scènes du Sud qui essayent de bouger de leur côté avec moins de moyens, pas le même public ?
David : Pour nous, quand on est à Paris, ça se passe bien parce qu'on a tous traîné là-bas. Ca se passe bien à Marseille, comme ça se passe bien à Paris. On a un petit public Parisien.
Pam : L'omnipotence, où la présence forte de Paris dans les milieux culturels tu peux l'ignorer quand tu y habite parce que tu n'as pas de comparaison, mais quand tu pars, tu te rends compte qu'il y a une revendication de décentralisation largement justifiée. C'est évident, et nous, on est encore mieux placé pour le voir parce qu'au début on a évolué dans cet endroit sans même la conscience des difficultés que d'autres pouvaient avoir. On s'en est rendu compte avec l'âge et à force de rencontres et de discussions.

U.R. : Sinon, votre actualité, vos projets ?
Fred : On est en concert le 23/01 au Cargo de Arles, le 26/01 on fait la première partie de Toots à Toulon…

U.R. : Des projets d'enregistrements ?
David : Il y a un titre qui sort, c'est " Tranquille la version " sur la compilation " Skapellation d'origine contrôlée " ( compil ska du label MOON SKA RECORD à sortir en janvier 99). Sinon il y a aussi un morceau sur le laser de Patate Records, retravaillé avec un changement de voix (Compilation à sortir au printemps 99) On a aussi en projet d'enregistrer un disque en 99…

U.R. : Vous savez avec qui ? Dans quelles conditions ?
Pam. Ça ressemblerait à de l'auto-production… Mais c'est tôt encore parce qu'on veut sortir quelque chose de costaud du point de vue du son, de plein de points de vues et les essais en studio ne sont pas toujours probants…

U.R. : Vous ne vous sentez pas suffisamment rodés pour sortir un disque ?
Pam : Voilà !
David : On a des exigences de son et on n'est pas encore satisfait.
Pam : Et puis des exigences de sons c'est des exigences de sous, donc le problème reste simple à comprendre… On essaie de passer un maximum en studio, en plus du travail sur la scène, et dès qu'on peut…
David : On s'est rendu compte que le public demandait tout le temps un disque. C'est clair que c'est agréable, quand t'as aimé un groupe, de pouvoir l'écouter chez toi. Sinon on essaie de tourner au maximum, on fait des festivals, on devrait aller en Bretagne.

U.R. : Rennes ?
David :Oui, mais on essaye de réunir des dates parce que pour un seul concert t'en es forcément de ta poche.

U.R. : Vous parliez d'un concert à Toulon… Toulon c'est un concert comme les autres ?
David : Là, c'est un concert comme les autres sauf que c'est une grosse scène ( le 26/01 au Zénith Omega ). Sinon, par rapport au FN, pour moi jouer dans une ville RPR c'est un peu pareil. C'est pas parce que les gens de Vitrolles ont laissé passer le FN qu'il faut toujours le leur renvoyer. Ça agace les gens qui, déjà, le vivent au quotidien. Ils ont plus besoin de faire la fête que d'entendre toujours le même discours, dont ils sont gavés… Quand tu habites une ville comme ça dès que tu sors à l'extérieur de ta ville on te renvoi tout le temps au FN.
Pam : On a déjà joué à Toulon

U.R. : Donc, pas de boycott ?
David : Surtout pas. On y va avec notre discours à nous, propre.

U.R. : Avec un certain engagement ?
Fred : L'engagement de tous les jours, de la vie.
David : On fait un concert à Toulon, c'est pas pour autant qu'on va en profiter pour parler plus systématiquement du FN.
Pam : C'est ce qui c'était passé la dernière fois en concert, pendant les moments où on parle avec le public. Surtout que, dans la formation, chacun s'y essaie, on a tous envie d'échanger avec les gens. On est ressorti de ce concert à Toulon avec le sentiment que les brèves incartades qu'on avait essayées de placer n'étaient pas bien passées. Ce n'est pas évident de prendre des positions, ou alors il faut reprendre le discours limpide, la langue molle anti-FN que tout le monde utilise, mais c'est comme un sketch de show-business.
David : C'est comme " légalisez la Ganja "…
Pam : Chacun essayait, un peu à sa manière, sa voix, pour marquer la solidarité et placer des petits trucs comme ça, et en général les gens devant la scène avaient l'air de pas avoir envie d'entendre des références… C'est vraiment le sentiment que le public nous a filé.

U.R. : Ils n'avaient pas forcement envie qu'on leur renvoie dans la face qu'ils ont laissé entrer le FN…
Pam : Et puis ils n'ont même pas de leçon à recevoir, c'est eux qui le vivent..

U.R. : C'est difficile d'arriver en leur disant "Nous, on sait ce qu'il faudrait faire "…
David : D'autant plus que Marseille ça craint, ça peut arriver d'un moment à l'autre ! On regarde Toulon, mais Marseille c'est grave.
Pam : Par exemple à la Plaine (le quartier branché de Marseille), il y a un kiosque où toutes les publications du FN, sont affichées en haut à gauche. C'est sur la Plaine, un kiosque affiché ouvertement FN. En gros c'est la même chose. Il y a bien sûr une différence avec des gens qui sont victimes du racisme par la municipalité, pour des attributions de logement, ou sur le plan culturel etc, mais du point de vue de la coexistence entre les gens le problème reste à peu près le même.. Tu repère des fachos qui marchent à côté de toi, ça se sent… Sur l'autoroute de Toulon y a une pancarte FNJ " Bienvenue dans le Var ".
David : Tarascon ou d'autres villes c'est pareil.

U.R. : Le problème ne se pose pas qu'à Toulon, Orange ou Vitrolles
David : C'est clair !

U.R. : On revient à la musique : deux cuivres pour faire du Ska, vous le sentez comment ?
David : Ca fait deux ans qu'avec un cuivre ça fonctionne, donc…
Pam : Par rapport aux origines du Ska et par rapport à l'enregistrement c'est une difficulté parce qu'on ne peut pas refaire une bande de Ska. Le problème de la section correspond à ça, on a envie d'inventer, de venir dans des trucs, c'est comme de la mayonnaise. Le Ska c'est une origine, on ne fait pas de la copie. Ça chante en français…
David : On fait comme les Jamaïcains c'est à dire qu'on écoute d'autres musiques qu'on mêle à la base du " Jamaican Ska "
Pam : " Calme et regular "
David : Le trombone (nouveau dans la formation) c'est pour avoir plus de son, sur scène en particulier. On a souvent entendu qu'il manquait un petit truc en concert.
Pam : De n'être que quatre ça a toujours été le moteur de nos " innovations ". Chacun donne plus parce qu'on n'a pas de section, qu'on n'est pas une grande formation.
David : Et on ne veut surtout pas faire que de la reprise des Skatalites ou des autres standards, parce qu'on l'a déjà tous fait dans d'autres formations. On veut sortir de ça, on commence une autre histoire. Et puis si tu veux faire de la copie jamaïcaine, faut vraiment avoir un super son. Pam : Les Américains, ils s'y essaient et ils sont super forts. Comme New-York Ska Jazz ou Hepcat, qui, du point de vue son, jeu et tout sont excellents.

U.R. : Un dernier mot, pour la fin ?
Pam : On n'a pas parlé de l'idée de fonctionner en concert avec une sorte de " micro ouvert ", ou plutôt de " micro préparé ", c'est à dire de faire des invitations de chanteurs, de la scène Marseillaise puisqu'on les connaît bien, et qu'on à déjà joué plus ou moins ensemble, pas comme un Sound System mais vraiment avec une préparation.. On arrivera à le faire peut être pour les concerts de la fin du mois de janvier…

PROPOS RECUEILLIS PAR AURELIE.